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- 4 mai 2021 |
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Le pacte DUTREIL est un dispositif d’optimisation fiscale permettant la réduction des trois-quarts de la valeur des titres de société lors de donations ou successions. Afin de mettre en place ce dernier, il faut cependant respecter certains critères, ainsi que procéder à l’évaluation de marché des titres de l’entreprise pour prévenir tout risque de redressement fiscal lors de la donation-succession.
Afin de bien comprendre l’importance du pacte DUTREIL pour les droits de donation, nous revenons pour vous sur sa définition et son utilisation, sans oublier de préciser sa place dans la situation actuelle liée à la pandémie de Covid-19.
Le pacte DUTREIL, définition et utilisation
Le pacte DUTREIL trouve son origine dans la Loi Dutreil, publiée en 2003. Cette dernière facilite la création d’entreprise en allégeant la fiscalité et en réduisant les démarches administratives. Cette loi s’organise autour de cinq éléments principaux, à savoir : l’accessibilité de la création, l’allégement des cotisations sociales, l’aide au financement, la fiscalité allégée et la simplification administrative.
Ainsi, le pacte DUTREIL est un dispositif permettant l’optimisation de la fiscalité lors de donations ou successions à ses enfants portant sur des titres d’une société. Pour en bénéficier, il faut respecter certains critères qui permettent d’obtenir alors une exonération de droits de mutation à titre gratuit, et donc de réduire l’assiette fiscale des titres de société transmis des trois-quarts de leur valeur.
Cependant, si le dispositif DUTREIL allège le coût fiscal des transmissions à titre gratuit pour les entreprises individuelles comme pour les sociétés, sa mise en place soulève également la question de l’évaluation à la valeur de marché des titres de la société. Il convient pour toute entreprise dans cette situation de choisir la méthode la plus adaptée pour sa donation ou succession.
Respect des critères et évaluation de l’entreprise
La mise en place du pacte DUTREIL se doit d’être anticipée, car elle implique des engagements collectifs puis individuels, sur une période de six années. Avant la transmission, il faut souscrire un engagement collectif de conservation d’au moins deux ans, puis respecter un engagement individuel de conservation des titres de quatre ans après la transmission. L’activité transmise doit être éligible, et donc conserver une activité éligible pendant la durée des engagements. En plus de respecter la durée de conservation des titres, le pacte doit porter sur un minimum de 34 % des titres de la société si elle n’est pas cotée. Pour finir, l’un des membres du pacte doit exercer une fonction de direction au sein de la société.
Depuis sa mise en œuvre en 2003, le pacte DUTREIL a connu plusieurs modifications. En 2019, la loi de finance a assoupli les conditions pour la réalisation d’un apport via une société holding. La holding ne doit plus être entièrement détenue par les signataires du pacte, mais seulement à hauteur de 75 %, ce qui signifie que son apport est désormais possible dès la période d’engagement collectif. En d’autres termes, la société de holding n’a plus à avoir été spécifiquement constituée pour une reprise.
Il existe également d’autres considérations, et en cas de contrôle de l’administration fiscale, il faut être en mesure de justifier la valeur de marché des titres de la société retenue lors de la donation-succession. C’est alors que l’évaluation indépendante peut s’avérer utile pour toute entreprise, afin de valider la valorisation et d’éviter les redressements de l’administration fiscale.
La valeur de marché de l’entreprise passe par de nombreux critères, de l’analyse du marché à la concurrence, de la stratégie aux résultats financiers. Avec l’expérience d’un spécialiste en évaluation, qui recouvre l’ensemble des compétences requises, vous pourrez bénéficier d’une assistance précieuse et vous prémunir d’un redressement fiscal.
Les méthodes classiquement admises par l’administration fiscale sont présentées dans son guide de “l’évaluation des entreprises et des titres de sociétés”. Nous retrouvons notamment les approches par les revenus (les flux de trésoreries actualisés, les surprofits de productivité), les approches par le marché (comptables de transaction ou boursier) ou des approches patrimoniales (l’actif net réévalué). Dans la majorité des cas, il est vivement recommandé d’appliquer plusieurs approches afin d’identifier la valeur de marché des titres de la société.
L’évaluation financière à l’ère de la Covid-19
Nous rappelons que la plupart des méthodologies d’évaluation se fondent notamment sur les données financières passées et sur des agrégats financiers dits “normatifs”.
Dans le cadre de l’analyse des comptes de l’exercice 2020 avec l’émergence de la pandémie de Covid-19, nous pouvons constater des baisses exceptionnelles importantes de l’activité et de la rentabilité de certaines sociétés qui pourraient donc avoir un impact direct sur leur valorisation si aucun ajustement n’était pris en compte. De même que pour l’approche par les flux qui consiste à avoir un plan d’affaires réaliste au regard de l’historique.
Dans ce contexte, il est donc indispensable d’utiliser une approche multicritères et de réaliser des études de sensibilité aux principaux paramètres d’évaluation afin de s’assurer d’une valorisation au plus juste.
Avec la baisse d’activité et de la rentabilité, la transmission se veut plus intéressante pour un chef d’entreprise. En effet, les valorisations de certaines sociétés pourraient avoir baissées, diminuant ainsi les droits à payer. Par exemple, si la valorisation d’une entreprise diminue de moitié, les droits de succession s’en verront tout autant diminués.
Et si le contexte est difficile pour tous, il peut être une opportunité pour certains de transmettre leur patrimoine et d’espérer faire perdurer leur vision d’entreprise. D’autant plus qu’avec les récents allègements de détention, les chefs d’entreprise d’ETI et PME peuvent désormais éviter une dispersion de leur patrimoine familial en recentrant ce dernier.
Pour finir, n’oubliez pas que les droits de donation ou de succession sont calculés à partir de la valeur des biens transmis. En l’absence d’un pacte DUTREIL, les droits sont calculés sur la valeur des actions transmises et/ou des parts sociales. Avec la conclusion d’un pacte DUTREIL, les droits de donation sont calculés sur un quart de la valeur, ce qui réduit notablement leur montant.
AUTEUR :
En charge du département EVALUATION du GROUPE AURYS, Ghislain d’OUINCE dispose de plus de 10 ans d’expérience au sein de banques d’affaires et de cabinet d’audit et de conseil en « Corporate Finance ».